Ermite ou pas Ermite ? Posted on 6 juin 2019

Raconter les histoires de Sybirol, c’est lui rendre son âme. Certaines appartiennent à la grande histoire, d’autres à la petite. Certaines sont documentées, d’autres appartiennent à la mémoire familiale. Évidemment Sybirol, s’il a une âme, n’a pas encore de voix, il fallait donc lui en prêter une. Et c’est pour cela que vous trouverez un « je » dans certaines de ces histoires. « Je », c’est Pierre, la dernière personne qui, après au moins 600 ans d’occupation, aura l’occasion de vivre Sybirol de sa naissance à sa mort (du moins il le souhaite !). Nous espérons que ces histoires vont vous distraire, vous intéresser, vous toucher. Sybirol se nourrit de l’affection que lui portent tous les visiteurs qui le découvre.

Y-a-t-il eu un ermite ou pas à Sybirol ? Autrement dit l’Ermitage est-il un vrai Ermitage construit avant la révolution ou bien un faux Ermitage construit au 19ème par Fischer ?

Quand j’étais enfant, la réponse était simple : ma grand-mère racontait qu’un ermite s’était réfugié dans Sybirol pendant la révolution, qu’il y était mort et enterré avec sa femme. Je sais, un ermite marié, cela aurait dû éveiller mes soupçons, mais quand on est enfant, ce que dit une grand-mère est forcément vrai et nous avons consciencieusement cherché les tombes de l’ermite et de sa femme pendant des années !

D’ailleurs, il y a bien un écrivain qui a signé du nom « L’Ermite de Floirac » un ouvrage essentiel de la littérature française : « Réfutation de l’histoire de Bordeaux de Mr Bernadau », un livre plein de critiques et de procès d’intention contre ce Mr Bernadau. Que ce livre ai pu être écrit par un ermite, vu l’amertume qui s’en dégage, possible. Mais aucun indice ou preuve de son lien avec Sybirol ! En plus il a été publié en 1838 ! N’empêche que lorsque je l’ai trouvé sur Amazon, je l’ai acheté et je le tiens à votre disposition. Je crains cependant que cela ne puisse étayer sérieusement l’histoire de ma grand-mère.

2014, les architectes en monuments historiques se penchent sur le cas de notre ermitage. Précisons qu’il est composé de 2 constructions : la chapelle et la maison de l’ermite, installés sur une terrasse à flanc de coteaux et entourés d’un bosquet de cyprès. Et bien figurez-vous que nos spécialistes ne sont pas complétement d’accord. Certes le passage du 19ème est certain : la maison de l’ermite avec ses réemplois de pierres taillées, pierres rocaillées qui encadrent la porte, cela fait très 19ème. En plus c’est bien dans l’esprit des jardins pittoresques que d’installer une chapelle en fabrique !

Mais la construction de la chapelle utilise un appareillage compatible avec les techniques de construction du 18ème pour du patrimoine vernaculaire. Et puis, la présence d’ermitages à Cenon et Lormont antérieurs à la révolution est attestée, et puis il y a les Cypressats qui entourent l’ermitage avec leur tradition : tout bateau qui quittait le port devait venir chercher sur ces collines une branche de cyprès, à la fois signe que l’octroi était payé mais aussi manière de se garantir un retour sain et sauf, et puis l’ermitage est juste en dessous de la source du Cypressat, et puis la cheminée de la maison a bien été utilisée…

Bref, ma grand-mère n’avait peut-être pas complétement tort ! Et les architectes laissent planer un doute raisonnable dont il faudra bien se contenter.